Palimpseste a écrit :Le désir d'enfant, la maternité, la paternité, l'éducation sont le fruit d'un vécu extrêmement personnel, la conjonction d'acquis ou de carences, d'exigences personnelles ou d'abandons, de prisons intérieures et de rêves.
Avec une vision suffisamment réductrice et terne de sa propre existence, le libre-arbitre, le projet, la volonté de puissance, le sens de ses intérêts, la raison et l'état de "présence au monde" peuvent toujours se ramener à une suite infinie et absurde de sales manies, d'accidents de parcours, de tendances psychocliniques. Je n'ai donc aucun moyen de porter la contradiction à ce non-argument : on ne fait pas de métaphysique avec un cognitiviste, pas plus que de philosophie avec un matérialiste, ou de morale avec un hyper-relativiste. Tout est possible, tout est absurde, tout est insignifiant, tout est explicable, hérité, construit et "toc" ? Certes, on peut le voir comme ça. Mais alors gagnons du temps et n'en parlons pas.
Palimpseste a écrit :En gros, sur ces sujets-là, vous penserez et agirez toujours en fonction de ce que vous avez connu : soit pour le rejeter, soit pour le réparer, soit pour le perpétuer.
Pas d'existence ex nihilo. L'Homme est une machine à réagir. Mais ce que tu fais glisser sous le tapis dans ton tour de passe-passe, c'est que ce choix entre "rejeter, réparer, perpétuer", c'est déjà la fin de la prévisibilité. C'est déjà sortir de la "fonction de ce qu'on a connu". De même que chaque fois que je discute avec quelqu'un, je réagis à son argument. Ce qui ne fait pas de mon opinion une "fonction" de la sienne. La part manquante de ton équation, c'est moi, tout simplement.
Palimpseste a écrit :Vous ne pouvez pas y échapper (même en vous abstenant d'avoir des enfants).
On y échappe très bien quand on accepte l'idée de son existence au monde, et qu'on cesse de se réduire à un sac de viande métaphysiquement passif.
Palimpseste a écrit :Le désir d'enfant nébuleux, vécu dans une forme de déni, c'est surtout un instinct de survie. Une grossesse à la roulette russe, c'est parfois vouloir survivre à un truc personnel. L'argument vous semble moche ?
Non. Il me semble surtout qu'il s'agit moins d'un argument que d'une description de gens en souffrance, qui subissent leur grossesse comme ils subissent leur vie. Et si je les plains, sincèrement, tendrement, cela ne me force pas pour autant à en faire les étalons du genre humain, ni de leur misère et de leur erreur un "argument".
Palimpseste a écrit :Tant pis, il existe depuis que le monde est monde. Et ne vous en déplaise, il continuera son petit bonhomme de chemin, quelle que soit votre opinion sur ce forum et ailleurs.
En fait, cette approche n'est pas un chemin, surtout. Le seul fait que sa laideur demeure intacte, inchangée, improductive, depuis que le monde est monde (ainsi que tu le soulignes très justement) prouve surtout que c'est un cul-de-sac, qui a bien du mal à faire son chemin. Quand un connard joue avec des pigments et de la terre glaise dans une grotte, et que quelques siècles et millénaires plus tard on admire la galerie des offices, l'argument est beau PARCE QU'il a fait son bonhomme de chemin, justement. Quand un connard dit "la merde, ça pue, mais c'est ça la vie, alors autant me rouler dedans", la laideur de son idée n'est pas la contingence d'un paradigme qui fait son petit bonhomme de chemin, elle est la résultante inéluctable d'une idée qui ne peut pas progresser d'un iota en n millions d'années.
Palimpseste a écrit :Les motivations de Tybosy vous semblent malhonnêtes ?
Non, son mode d'interaction me semble ridicule et contre-productif, et son analyse me semble imbécile. Je laisse volontairement de côté, comme souvent d'ailleurs, la question des motivations. Laquelle me dépasse et m'intéresse assez peu.
Palimpseste a écrit :Je maintiens que la responsabilité est partagée et qu'ils ont pris ce risque sciemment à deux.
Encore une fois, l'un prenait le risque d'être père quand l'autre prenait celui d'avorter. Par ailleurs, si l'on considère que la décision d'avorter ou pas revient à la femme "parce que c'est son corps, sa grossesse, sa vie de femme", il n'y a pas responsabilité partagée. La responsabilité est partagée quand le pouvoir décisionnel ultime l'est aussi. Si l'une peut "prendre le risque" du jour au lendemain, puis changer d'avis au dernier moment sans rien demander à personne, il n'y a pas deux responsables, mais une responsable et son complice.
Palimpseste a écrit :Donc voilà, maintenant ils sont content.
Pour ce que j'en ai entendu, ils ont pas l'air. Faut croire que l'épanouissement de leur "instinct de survie" ne leur réussit pas.
Palimpseste a écrit :Ils ont bien vérifié ensemble, qu'on ne leur a pas raconté d'histoire : on fait bien les bébés comme ça ! En plus, ils sont sûrs tous les deux que leur tuyauterie interne est bien fonctionnelle (et oui, ça fait partie parfois des obscures motivations... )
Oh, on trouve même des fous et des abrutis chez qui le fait d'avoir marché dans une merde de chien le matin est une motivation à un mass-murder le soir. Pour ma part, dans ce genre de cas, je préfère parler de "délire" que de "motivation". C'est plus clair et ça évite de tout mélanger. Quand un mec apprend le go dans l'espoir de mieux entrevoir la notion de contrôle, je veux bien placer le mot "motivation", même si c'est un mauvais calcul. Quand un timbré paranoïaque tire préventivement sur un inconnu parce qu'il s'imagine que c'était un agent de la CIA venu pour le liquider, je m'en tiens au "délire". Quant à ceux qui font un gosse pour vérifier leur tuyauterie, je sais dans quelle case je les range.
Palimpseste a écrit :C'est vrai qu'à l'heure actuelle où on programme sa grossesse pour que le congé de maternité s'enchaine sur les congés annuel, à l'heure où on programme son accouchement pour que le gynéco puisse partir sur son voilier à la date prévue, à l'heure où, où, où... Et bien à cette belle époque, où on voudrait tout maîtriser, il y a encore des choses qui ne se maîtrisent pas, dont cet instinct de survie à soi-même ou d'autodestruction selon les cas.
Et tu illustres bien mon premier point : quand on réduit tout désir de liberté, de quête de sens, de maîtrise de soi à une névrose, il ne reste plus que la chienlit ou l'hygiénisme. Entre les deux, je me plais à imaginer qu'il existe l'hygiène. Un truc à mi-chemin, pour les gens honnêtes et pas complètement barrés, qui leur fait prendre suffisamment au sérieux la vie pour qu'il ne s'agisse pas de "vérifier la tuyauterie dans un instinct de survie autodestructeur" sans que cela les force pour autant à considérer la maternité comme la livraison d'un objet de consommation acheté par paypal.
Palimpseste a écrit :Donc juger cette demoiselle sur quelques semaines de sa vie résumées ici, dans une situation où elle se sent aux abois, dans un moment paroxystique de son existence, c'est petit.
Ce serait petit si quiconque jugeait cette demoiselle. Mais en l'occurrence, je pense que les gens jugent surtout son action au cours des quelques semaines de sa vie résumées ici, sur la base ... du récit de son action au cours des quelques semaines de sa vie résumées ici. Tu as vu quelqu'un sortir des clous en particulier ? En inférer quelque chose sur son enfance ? Etablir un diagnostic sur sa vie professionnelle ? Extrapoler sur son rapport à la religion ou à la nation ?
Palimpseste a écrit :Elle vous paraît hystérique ?
Non, elle me paraît triste. Et sale.
Palimpseste a écrit :Ok, mais laissez-lui du temps.
Mais il ne nous appartient pas de "lui laisser" du temps. Elle a, à la fois, tout le temps du monde, et bien peu de temps devant elle : le temps de sa vie, pas une minute de plus ou de moins, et dont elle fera bien ce qu'elle veut quel que puisse être notre avis. Encore une fois, personne ne l'a frappée d'anathème. Elle nous raconte comment elle a géré sa grossesse, ceux qui trouvent ça dégueulasse essaient de l'aider en lui disant que c'est dégueulasse, ceux qui lui donnent raison essaient de l'aider en l'encourageant. Et dans 2 jours, 2 semaines, 2 mois ou 2 ans, quand elle ne passera plus sur le forum, elle continuera à faire comme elle veut et comme elle peut sans notre avis. Pourquoi devrait-on s'interdire de juger ce qu'elle nous raconte ? Et surtout, si on le fait, de quoi parle-t-on ?
Palimpseste a écrit :Si elle doit garder ce bébé, au second trimestre, ses hormones se calmeront, son discours sera moins chaotique. Elle vomira moins, elle n'aura plus envie de dormir jour et nuit, elle aura moins de montagnes russes hormonales et ses idées se remettront en place. Si elle choisit de ne pas garder ce bébé, ce sera un moment pénible, mais qui fera d'elle une femme plus un peu moins naïve, un peu abimée peut être, mais beaucoup plus forte. Et n'oublions pas dans son premier post ces mots : "comme il m’a dit qu’il souhaitait le garder, j’ai eu droit à une écho, j’ai entendu son cœur battre, j’ai la date prévue d’accouchement, toutes ces choses dont je me serais passée si il m’avait dit clairement d’avorter avant le rendez-vous."
Oui, ce gros enfoiré n'a même pas pu se décider en 48 heures. Bon, il est vrai que le droit français lui donne à elle 12 semaines pour décider toute seule sans rien demander à personne. Mais lui, ne pas se décider en 2 jours, il pousse vraiment le bouchon. Elle a bien fait de le menacer.
Palimpseste a écrit :Keine panik cher(e)s jrmistes. Ce n'est qu'un embryon, un fantasme d'enfant à ce stade.
Je crois que la majorité des participants au thread jugent problématique la manière dont elle conçoit son couple, plus que son éventuelle envie de garder l'enfant. En tout cas en ce qui me concerne, je n'ai rien contre le fait qu'elle garde le gosse, même si ça fait chier son mec. Là où je descends du train, c'est quand elle le menace de tout foutre en l'air sur un coup de tête, essaie de le pigeonner, trouve qu'il devrait "assumer" un gosse dont il ne souhaite pas la naissance, et le traite de connard. Mais si elle veut avoir ce gosse toute seule, pour elle, de manière adulte et responsable, qu'elle a les moyens de subvenir seule à ses besoins et se sent prête, je n'ai rien à lui dire sinon "bonne chance". Mais n'essaie pas de battre les cartes en douce : c'est de son chantage absurde qu'on parle, non d'un éventuel désir raisonnable de maternité.